L’œuvre d’art brut : de l’atelier d’expression plastique à la médiation thérapeutique
En bref
Histoire de l’art brut, contenu du stage, partenariat LaM – Ceméa, reportage en immersion.
Les Ceméa, en partenariat avec le LaM – Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, organise un stage « art brut » à destination des professionnel·les de la santé mentale, de la psychiatrie et de l’intervention sociale.
Aujourd’hui, la notion d’art brut créée par Jean Dubuffet en 1945 peut être considérée comme un phénomène appartenant à part entière à l’art du XXe siècle. Nombreux sont les artistes, encore aujourd’hui, qui s’y réfèrent dans leurs démarches et leurs pratiques. S’initier à l’art brut, pratiquer des ateliers, visiter une collection, s’interroger sur la place de l’activité dans le projet de soin ou éducatif sont les leviers de ce stage.
Reportage en immersion, à travers des interviews croisés de l’équipe d’encadrement et des stagiaires, durant la session de 2023.
Le LaM, un musée ouvert à l’art de son époque
Pouvez-vous me présenter le musée, sa particularité, son histoire ?
Christophe Boulanger – Nous sommes dans la région Hauts-de-France, dans la Métropole lilloise, représentant un bassin d’un million et demi de personnes. Et plus précisément, dans une ville nouvelle des années 70 qui s’appelle Villeneuve-d’Ascq. À l’intérieur de cette ville, il y a le parc du Héron dans lequel est situé le musée. C’est un musée dont les murs et la collection appartiennent à la Métropole Européenne de Lille. Ce n’est pas un musée municipal, même si la ville est très présente.
Le musée a ouvert en 1983, suite à la donation d’une importante collection d’art moderne d’un couple d’industriels de la région : Geneviève et Jean Masurel. Ils avaient décidé d’offrir au public leur collection.
Cette collection est héritée d’un oncle, Roger Dutilleul, qui, n’ayant pas d’enfant, avait transmis cette collection à Jean Masurel. Roger Dutilleul était un des rares collectionneurs français des débuts des avant-gardes et notamment du cubisme. Il a commencé en voulant s’acheter une œuvre de Paul Cézanne, qui n’était alors encore pas trop cher. En 1906, il pousse la porte de la galerie Kanhweiler. Il découvre des œuvres de George Braque, Picasso ou encore Modigliani. Ce n’est pas quelqu’un de très fortuné. Parfois, il revend des œuvres pour en acheter d’autres. Il va posséder jusqu’à 40 Modigliani. C’est un passionné absolu donc c’est une très belle collection de 250 numéros.
Le musée devait rester ouvert à l'art de son époque.
Bref, le musée ouvre en 83. Très intelligemment, les donateurs avaient inscrit dans l’acte de donation que le musée devait rester ouvert à l’art de son époque. Dans les années 80, le musée est alors connu pour ses expositions d’art contemporain.
C’est ce qu’on appelle les musées en province avec une politique très dynamique. Le fait d’avoir une collection moderne, permet de faire rayonner le musée de par les emprunts au niveau international. C’est bien de pouvoir prêter de belles œuvres car en retour on peut demander de belles œuvres pour monter des expositions.
Pour finir, le ministère de l’époque se rapproche du musée pour lui faire connaître qu’une collection d’art brut, en région parisienne, cherche à être présentée par un musée. C’est la fameuse collection de Madeleine Lommel, Claire Teller et Michel Nedjar et qui va s’appeler, dès 1982, L’Aracine. Ce sont des gens qui ont décidé de monter une collection parce que la collection de Jean Dubuffet, la grande collection d’Art brut, est partie dans le milieu des années 70 à Lausanne, en Suisse. Ils regrettent cette situation et veulent remonter une collection en France. Dès les années 80, ils le font avec une telle énergie, que, dès 86, ils ont le statut de musée de France, à Neuilly-sur-Marne. Ils font un travail incroyable, ils sont à la fois conservateurs, restaurateurs, ils font le ménage, ils font tout en quelque sorte. Ça marche tellement, que dans les années 1990, ils ont environ 3 500 œuvres. Et c’est là qu’ils se tournent vers une collectivité. Ça viendra ici.
Ça a un succès incroyable.
En 1996, le musée présente une grande exposition d’art des œuvres de la collection L’Aracine afin de la tester auprès du public. Ça a un succès incroyable. Il y a ce qu’on appelle les primovisiteurs à l’époque, qui n’étaient jamais venus dans un musée et qui viennent voir l’art brut. Il y a eu 72 000 visiteurs cette année-là. En 1999, il a été décidé que cette collection ne reste pas simplement déposée mais qu’elle soit donnée au musée avec la promesse de la construction d’une extension pour abriter la collection. Le projet est pensé, au début, un peu à part. Mais le projet du musée est vraiment de lier les collections. L’idée, c’est que le visiteur, avec son ticket, puisse voir toutes les collections. Même si, au sens de Dubuffet, l’art brut est un peu en dehors des circuits classiques, aujourd’hui, dans le musée, l’art brut se confronte aux expositions temporaires et au parcours permanent. Même s’il garde ses spécificités, pour nous, c’est un des versants de la modernité. On ne saisit pas la modernité, si on n’a pas l’art brut.
Comment définiriez-vous l’art brut ?
Christophe Boulanger – Un ami artiste, Pierre Merci, disparu aujourd’hui, disait « l’Art brut, c’est celui qui dit qu’il n’y ait pas ». C’est une bonne définition. L’art brut, c’est un terme inventé par Dubuffet en 1945. Pour lui, ce sont des gens qui ont une expression artistique de très haute qualité mais qui sont, en quelque sorte, totalement autodidactes, qui n’ont suivi aucune formation, qui sont en dehors des circuits de l’art et je dirais presque, en dehors de la société, en tout cas, des cercles culturels. L’art brut, ce n’est pas un art brutal mais un art à l’état brut. C’est un artiste qui rêve d’une origine de l’art. Un art au plus près de la psyché et du corps.
Il y a l'idée d'un art populaire.
Au départ, Dubuffet, pensait parler d’art obscur car ce n’était pas connu. Et puis, il se dit que ce n’est pas plus obscur qu’autre chose, ce sera brut. Il va prospecter dans des milieux qu’on lui signale : dans les prisons, les hôpitaux psychiatriques, mais aussi des autodidactes à la campagne. Il va également prospecter dans les milieux spirits. Non pas que Dubuffet soit spirit, mais souvent, les personnes en contact avec les esprits ne se considèrent pas comme des gens qui produisent, comme des créateurs mais comme des intercesseurs. On peut le faire avec un verre, une table de ouija, des écritures mais aussi des dessins, et c’est ça qui va intéresser Dubuffet. On a l’exemple dans le Nord de ces magnifiques peintures peintes par des mineurs de fond, cafetiers, etc. comme Augustin Lesage, Victor Simon, Fleury Joseph Crépin. Derrière l’idée de Dubuffet, il y a aussi l’idée d’un art populaire. Mais on pourrait élargir ce cercle à André Breton, Max Ernst ou encore Robert Doisneau.
Vivre un stage "art brut"
Pouvez-vous vous présenter et nous dire sur quel sujet vous intervenez dans la formation ?
Savine Faupin – Je suis conservatrice en chef en charge de la collection d’art brut. Dans le cadre de la formation Ceméa, je fais découvrir des œuvres qui peuvent être, soit accrochées dans les salles, soit dans les ateliers de restauration ou de la réserve pour montrer le travail que l’on effectue sur les œuvres issues de contextes hospitaliers mais pas seulement. Il s’agit de montrer également le soin que l’on apporte aux œuvres en leur montrant la façon de les conserver, de les garder et de les transmettre.
J’évoque également le travail de recherches, de découvertes, d’enquêtes qu’on est aussi amené à faire sur des œuvres pour retrouver l’histoire d’une personne qui, souvent, est une illustre inconnue.
Christophe Boulanger – Je suis attaché de conservation en charge de la collection d’art brut. Je partage mon temps entre le travail sur la collection, les expositions et les publications. Je suis également artiste, je fais des scénographies. Je travaille beaucoup avec le Fresnoy et ça me permet de garder un pied dans la création contemporaine et dans « le faire ».
J’ai fait une thèse en esthétique sur un créateur d’art brut : Aimable Jayet et depuis longtemps, je travaille sur Saint-Alban. Et je me disais, qu’au travers d’une étude monographique, grâce aux documents, comme en micro-histoire, on pouvait regarder, à partir de là, le contexte. Donc je transmets mon intérêt pour l’art brut, dans une approche extrêmement ouverte, avec une place très importante pour l’histoire de la psychothérapie institutionnelle et de Saint-Alban mais aussi d’autres courants de la psychiatrie. J’ai l’impression que si on n’associe pas, à un moment, quelque chose qui est de l’ordre d’une histoire de la médecine, de la clinique, on perd les enjeux de l’importance de l’éruption de l’art brut dans le champ de l’art en Europe et particulièrement en France. Breton, par exemple, était infirmier-psychiatre. Les liens sont réels entre Bonnafé et les mouvements surréalistes.
Je coordonne également la formation, je propose une équipe. J’essaie d’amener également des personnes de l’extérieur.
Claudine Tomczak – Ma mission c’est de créer des outils de médiation et de monter des projets avec des structures très différentes : centres sociaux, centres de loisirs, structures liées au handicap avec des publics malvoyants, sourds, autisme, déficience mentale mais aussi toutes structures liées à la santé mentale. Je travaille également avec les structures pénitentiaires de la maison d’arrêt aux unités de radicalisation ou accueillant des ultra-violents, avec l’idée de travailler dans ces structures mais aussi de les faire venir au musée. Et je travaille aussi avec les jeunes publics qui regroupent toutes les activités pour les familles et les enfants dès l’âge de 18 mois.
Tout cela se fait avec un axe autour de la mixité : mixité bien évidemment des publics mais aussi mixité autour de l’art moderne, l’art contemporain et l’art brut. Je travaille souvent autour d’une thématique pour éviter le cloisonnement de la santé mentale et de l’art brut.
Je crée également des outils de médiations : des reproductions thermogonflées d’œuvres, copies de sculptures, des jeux ludiques pour tout type de public.
Dans la formation, j’amène le côté médiation et j’apporte une démarche pour monter un projet avec une structure muséale. On travaille sur des outils qui peuvent être utiles, aussi bien aux publics en situation de handicap qu’à tout autre type de public. On est sur une découverte théorique et pratique des possibilités au LaM sur le secteur diversité et inclusion.
Quel est le contenu de la formation ?
Claudine Tomczak – Dans un premier temps, on était plus sur l’histoire des liens qui se sont créés avec les hôpitaux par rapport aux artistes de la collection d’art brut et qui étaient en milieu asilaire ou en centre pénitentiaire. Et cerise sur le gâteau, Martine Deyres est venu présenter son film – Les Heures heureuses – sur l’histoire de Saint-Alban au moment de la Seconde Guerre mondiale.
Dans un second temps, il y a eu une pratique d’atelier tout en réfléchissant sur comment le mener avec un groupe : visite guidée de la collection sur le thème de la gravure, atelier gravure ensuite.
Ensuite, il y a eu une présentation du secteur diversité et inclusion avec toutes les possibilités de projets possibles et les outils de médiation à disposition. Savine Faupin est intervenue également sur le spiritisme dans l’art brut car le groupe en avait fait la demande.
On a également présenté le film de De nos propres mains, réalisé pendant un atelier d’art plastique mené par le LaM à Saint-Alban. Et on a terminé par la présentation d’un projet mené avec l’EPSM d’Armentières.
Les stagiaires ont eu la chance également de rencontrer Mohamed Bourouissa pendant le montage de son exposition. Ils ont également pu voir le montage de l’exposition sur Anselm Kiefer.
Le stage c’est de belles rencontres, de beaux discours et de belles histoires. On a raconté beaucoup d’histoires en mettant à l’honneur les usagers et ça c’est chouette.
Et en quoi est-ce important que cette formation ait lieu ?
Christophe Boulanger – Déjà, il y a un retour d’ascenseur. C’est-à-dire, que grâce à Lucien Bonnafé, puis la rencontre avec Jean Oury, on a ce monde qui s’est ouvert à nous, qui, pour partie, peut-être une histoire du soin ou de la clinique, mais aussi qui est une histoire des idées, une histoire des arts. Cela a irrigué notre travail ici. Et évidemment qu’en formant aux Ceméa, on se forme nous-même. En discutant avec des psychomotricien·nes, des psychologues, des infirmier·es ou encore des médecins, on a un retour qui est très important pour nous.
Paroles de stagiaires
Pouvez-vous vous présenter et nous présenter votre métier ?
Jean-Christophe – Je m’appelle Jean-Christophe Philippe et je suis infirmier en psychiatrie adulte. Je travaille dans un centre de consultation à destination des personnes qui souffrent de troubles du spectre autistique ou de troubles apparentés. Ça fait 10 ans que je travaille dans cette unité. J’ai travaillé un peu en région parisienne, où j’ai fait mes études à La Verrière. Après j’ai travaillé à Rueil-Malmaison et je suis revenu en Bretagne depuis 20 ans environ. D’abord en service intra-hospitalier et maintenant en extra-hospitalier.
Najia – Je suis infirmière depuis plus de 20 ans. J’ai d’abord intégré un service d’hospitalisation générale. Puis je me suis rapprochée de l’EPSM de l’agglomération lilloise où j’ai fait quelques années en tant qu’infirmière de nuit. Et ensuite, j’ai postulé pour un poste d’infirmière en pédopsychiatrie, en hôpital de jour. Et maintenant, je suis au CMP de Villeneuve d’Ascq depuis 9 ans. Je reçois les enfants en entretien individuel. Je fais aussi des entretiens avec les familles et je participe à des groupes. Je fais également des visites à domicile pour voir essentiellement des adolescents déscolarisés et isolés.
Pourquoi avoir choisi cette formation ?
Jean-Christophe – D’abord, tous les ans, on est soumis à une évaluation professionnelle où on nous demande de réfléchir à une formation à venir. J’avais déjà fait des formations via les Ceméa, il y a quelques années. J’aime bien l’éthique des Ceméa. Et puis dans le cadre de ma pratique, je suis amené à mettre en place beaucoup de médiation par rapport aux personnes que j’accueille, qui ont beaucoup de difficulté à parler et à être en relation. Donc cette médiation me permet, éventuellement, de favoriser une rencontre et aussi d’apaiser les troubles des personnes que je reçois.
C’est l’intitulé de la formation qui m’a interpelé. Cette formation se déroulant au LaM, c’était un gros bonus. Je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Pour la petite anecdote, j’ai une collègue qui m’a dit que j’allais faire un stage de pâte à modeler… Et puis pour moi, c’était aussi l’occasion de découvrir un lieu que je n’ai pas l’habitude de côtoyer, de profiter de cette occasion pour rencontrer d’autres personnes et des pratiques différentes.
Najia – C’est une formation passionnante ! Je ne suis pas spécialiste dans ce domaine mais j’aime beaucoup tout ce qui touche à l’art. J’avais l’idée de monter un projet de médiation artistique avec les enfants au CMP. Je me suis donc dit que cette formation pourrait m’apporter pas mal d’outils et d’idées pour monter ce genre d’atelier.
J’ai été impressionnée par l’accueil et l’investissement des personnes qui travaillent ici. Et ça, c’est quand même quelque chose. Ils ont été très accueillants et très ouverts pour présenter leur travail. Et ça, j’ai beaucoup apprécié.
Et maintenant que la formation est terminée, est-ce que ta pratique professionnelle va changer ?
Jean-Christophe – Oui forcément, je pense que je me souviendrai toute ma vie de ce stage. J’ai eu l’impression d’avoir reçu une injection de culture, d’art, de beaucoup de choses… Après avoir discuté avec les collègues de la formation, je vois qu’il y a des choses qui n’existent pas là ou je travaille et qui peuvent être misent en place. Ça va me permettre de transmettre ça à mes collègues et de voir si ça peut susciter de l’intérêt.
Najia – Ça m’a donné des idées. C’est pas vraiment une formation qui va me permettre de mettre en place directement le projet que je porte. Il faut encore que je creuse tout ça mais ça m’a permis d’ouvrir certaines portes.
LaM – Ceméa, un grand partenariat
Comment est né le partenariat entre le musée et les Ceméa ?
Christophe Boulanger – Quand la collection d’art brut va arriver au musée, on découvre tout un monde, vraiment nouveau pour nous, différent de l’art contemporain et de l’art moderne dans lequel on travaille. Madeleine Lommel, qui était la présidente de l’Aracine, nous dit qu’il faut absolument que l’on rencontre une personne très importante et cette personne s’appelle Lucien Bonnafé.
On va donc rencontrer Lucien Bonnafé, fin 96, début 97. Il nous parle de son amour du surréalisme et il nous raconte l’histoire de Saint-Alban. On finira par intervenir à Saint-Alban et on y fera des expositions. Lucien Bonnafé nous parle de sa vie, de la Croix marine, des Ceméa, etc. Et, quand bien plus tard, les premiers contacts se font avec les Ceméa, on était tout de suite partant pour proposer nos services. On a très vite pu s’inscrire dans le programme des formations professionnelles continues pour parler d’art brut. Le musée a une politique très importante d’action hors les murs. On a des liens très forts avec le médico-social également. C’est comme ça que ça s’est construit, toujours en pensée avec Lucien Bonnafé.
Très souvent, dans les formations, on parle de Saint-Alban, de son histoire très importante, qu’on essaie aussi parfois de démythifier. Avec d’autres lieux, c’est quand même la naissance de la psychothérapie institutionnelle et de la psychiatrie de secteur. Donc, avec toute cette dynamique, on est tombé dans les Ceméa. Et on a pu, grâce aux Ceméa Nord-Pas-de-Calais et leur grande implication, pouvoir continuer jusqu’à maintenant cette formation, qui est très importante pour nous aussi.
Et aujourd’hui, qu’en est-il de se partenariat ?
Claudine Tomczak – Aujourd’hui, mettre en place une formation en partenariat avec les Ceméa, ça va au-delà de mettre en place une formation. C’est aussi l’accueil de tous les stagiaires BAFA ou BPJEPS qu’on reçoit ici. Par exemple, sur le BAFA, on les reçoit une journée. On présente les possibilités d’activités et on met en place un atelier. On a aussi un partenariat sur l’évènement Citéphilo. Les Ceméa diffusent les infos sur nos journées d’études. On a des échanges sur des journées professionnelles. C’est vraiment un grand partenaire, c’est presque un pote quoi !
Travailler au LaM, simple travail ou travail militant ?
Savine Faupin – On est un petit peu militant, en tout cas, dans notre secteur de l’art brut. On défend des œuvres qui peuvent être totalement inconnues, qui, ici, vont côtoyer des Braque et des Picasso. C’est du militantisme de les faire connaître. L’histoire de la psychiatrie également parce qu’on se rend compte que même chez les personnes y travaillant, cette histoire est, parfois, méconnue.
Christophe Boulanger – Et puis il y a aussi le côté art vivant. Aller à La Criée à Reims, aller Au Mans pour le festival Encore Heureux, aller aux journées de la psychothérapie à Saint-Alban… Il y a des gens qui sont au travail, qui réfléchissent sur la société, sur la part d’aliénation qui n’est pas qu’une aliénation transcendantale singulière et intime mais qui est aussi une aliénation collective au sens de Marx. Et ça, c’est aussi important. Ce sont aussi des outils de travail et d’organisation qui nous permettent de faire institution à plusieurs au-delà des clivages pour essayer de sortir d’une hégémonie néolibérale et managériale.
Savine Faupin – Ce n’était pas évident, que dans un lieu comme ici, un musée d’art moderne et contemporain, quand l’art brut est arrivé, ça a ouvert aussi de nouvelles portes. Ce n’était pas évident, par exemple, d’aller travailler en psychiatrie ou en prison. On tient également à montrer des œuvres dans des contextes totalement inhabituels.
Quelle est la politique d’accueil des groupes au musée ?
Claudine Tomczak – C’est l’ouverture culturelle pour tous ! On a des activités musicales et artistiques dès l’âge de 18 mois. Et on fait des activités jusqu’aux personnes âgées sur les projets qu’on monte. Ensuite, il y a tout le public individuel. Quand on a un groupe de personnes détenues, on ne ferme pas le musée pour les recevoir. Quand on reçoit un groupe d’enfants autistes, c’est la même chose. On a tout de même une démarche d’adaptation, on les fait venir une première fois pendant que le musée est fermé et ensuite on les fait venir quand il y a du monde. On essaye d’être au plus proche du public et de s’adapter à eux. C’est à nous de nous adapter et pas à eux !
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